Islande

Islande : l’écriture dans le sang

Islande : l’écriture dans le sang

« Si à 30 ans on n’a pas publié un livre, on a raté sa vie ». Telle pourrait être la devise des Islandais. Parce qu’avant de dire « on a été en Islande » on peut s’exclamer « on a voyagé en Islande à travers sa littérature ». On peut même remonter le temps grâce à elle, jusqu’aux Vikings. C’est une folie unique, celle d’un peuple de 35000 âmes qui écrit pendant 250 ans au temps de la France moyen-âgeuse. En partie historique, en partie issue de l’imaginaire. Cette tradition ne s’est jamais perdue, elle demeure. Le premier lien avec l’Islande passe par des livres la contant. On la découvre dans un beau livre de photo ou dans un guide de voyage mais on apprend à la connaître à travers ses auteurs, poètes ou tueurs en série sur papier glacé.

Les cendres de l’Eyjafjallajökull ne sont pas les seules à être arrivées jusqu’en France, désormais sa littérature contemporaine s’est fait une place de choix dans les rayons des librairies.

Auður Ava Ólafsdóttir a transporté plus de 500 000 lecteurs français depuis 2010, Arnaldur Indriðason est un tueur productif adulé par presque 4 millions de français depuis 2002.  Quant à Sjón, il a davantage touché le public français en tant que plume de Bjork qu’en tant qu’écrivain à part entière, un succès confidentiel décevant.

D’autres noms, tout aussi difficilement prononçables d’une seule traite pour les non-initiés, ont fait leur place chez les libraires. En premier lieu Andri Snær Magnason avec son LoveStar (Grand Prix de l’Imaginaire 2016) satire grinçante de la société du futur avec au programme : fin de la vie privée et de l’individu, et publicité directement connectée dans son oreille. Autre innovation essentielle en faveur du bonheur humain, désormais c’est un logiciel qui calcule notre âme sœur et nous indique de qui nous devons tomber amoureux grâce à un simple calcul des ondes respectives de chacun.

On assiste à une rencontre littéraire entre les Monty Python et George Orwell, on voyage dans un monde loufoque, où le logiciel qui contrôle le monde est en Islande. Autre voyage avec Illska d’Eiríkur Örn Norddahl dans les extrêmes droites européennes et les traces contemporaines dans nos sociétés du nazisme et de l’Holocauste. Ovni de la rentrée littéraire 2015, c’est un examen au microscope de la société islandaise au plus profond de sa noirceur que nous propose l’auteur, on en ressort avec une image du pays et de ses écrivains chamboulée.

Puis arrive Jón Kalman Stefánsson avec sa deuxième trilogie D’ailleurs, les poissons n’ont pas de pieds et A la mesure de l’univers qui en constitue les deux premiers tomes. Entre 2010 et 2013, le lecteur français a pu découvrir la première : Entre ciel et terreLa tristesse des anges et Le cœur des hommes. Les critiques de l’époque lui avait attitré un beau précepte : son écriture est semblable aux paysages de son île, sublime et dépouillée. C’est la lutte pour survivre qui se déploie sous nos yeux, pas dans l’Islande du XIXe siècle sous domination danoise mais contre la nature islandaise.

La mer nourricière de poissons et fondement de l’économie de l’époque est aussi le tombeau des marins et l’ouverture sur le reste du monde. Quant à la neige,  elle habille le quotidien pendant les longs mois d’hiver et laisse place au moment de la réapparition du soleil printanier, des vallées dignes du jardin d’Eden, on imagine le Landmannalaugar avant même de le voir. On vit l’Islande avant d’y avoir foulé son sol.

 

Retrouvez tous les ouvrages islandais dans notre librairie de voyage au 48 rue Sainte-Anne à Paris (du lundi au samedi de 9h30 à 19h).

 

Par

GAELLE RENETEAUD-METZGER

 

Photographie de couverture

LOLA REBOUD