Cuba

Radio Voyageurs : 100% Cuba

Radio Voyageurs : 100% Cuba

Découvrez Cuba avec Radio Voyageurs. Emission animée par Valérie Expert et ses chroniqueurs Michel Yves Labbé, Jean-Pierre Chanial, Jean-Francois Rial, Thibaud Perdrix et William Navarrete.

 

 

Pendant longtemps, Jean-François Rial conseillait de ne pas aller à Cuba à cause du « flux délirant de touristes et du pays qui ne pouvait pas faire face ». Il insiste sur le fait qu’il y avait une vraie problématique de qualité de service : « C’est pourtant un de mes pays préférés au monde, La Havane en particulier, mais un pays communiste, avec un nombre dingue de touristes, c’était juste aller directement dans le mur. Faire la promotion de Cuba était totalement idiot ». Aujourd’hui, il a changé d’avis. Beaucoup moins de touristes s’y rendent, la qualité du service s’est améliorée. C’est donc le moment d’y aller ».

Jean-Pierre Chanial se permet de rappeler le contexte de l’afflux touristique pour Cuba : « Il y a eu la poignée de mains entre Obama et Raul Castro qui a donné de l’espoir à tout le monde. Du coup, beaucoup d’occidentaux se sont dit : Il faut tout de suite aller voir Cuba, avant que les Américains débarquent » !  Avec l’arrivée de Trump, l’embargo s’est renforcé et les Américains n’ont jamais débarqué mais les touristes ont continué à arriver en masse. 

 

Quand et comment part-on à Cuba ?

Valérie Expert pose ensuite des questions pratiques à Thibaud Perdrix sur les vols et les périodes idéales. « Avec une desserte quotidienne de Paris jusqu’à La Havane avec Air France, on peut aller à Cuba facilement et s’il faut éviter une période, c’est celle des pluies en octobre et novembre ». Jean-Pierre Chanial ajoute le mois de septembre à cause des ouragans. Thibaud Perdrix conseille la période des alizés, de décembre à mai, pendant laquelle il fait presque toujours beau grâce au vent. Il précise cependant qu’il s’agit d’une destination où l’on peut se rendre toute l’année. Quant au voyage en famille, il le recommande mais « plutôt avec des enfants assez grands ou des ados qui ont déjà une culture politique et artistique ».

Restaurant à Cuba

Cécile Perrinet Lhermitte

 

Loger chez l’habitant, dans les casas particulares

Selon Thibaud Perdrix, loger en « casas particulares » est la meilleure option d’hébergement à Cuba notamment à cause du déficit d’hôtels, toujours tenus par l’Etat, mais aussi pour la qualité de l’accueil et des services. Jean-François Rial surenchérit : « c’est exceptionnel car c’est ce qu’Air BnB devrait être partout. Vous vivez vraiment la vie locale, chez l’habitant, dans une maison privée ». Il précise aussi que la qualité de l’hôtellerie a énormément progressé et qu’il existe désormais de très grands hôtels, principalement à La Havane ». Pour Thibaud Perdrix, Cuba a aussi beaucoup appris des années folles de l’invasion touristique : « le secteur s’est fortement professionnalisé et le niveau de certaines casas particulares relève de l’hôtel boutique, surtout à La Havane et Trinidad ». Enfin, William Navarrete apporte un autre argument : « Aller dans les casas particulares, c’est aussi encourager les initiatives privées, faire vivre les Cubains, plus que l’Etat. Il faut aussi savoir que le propriétaire de la casa particular paye un impôt à l’état que sa maison soit vide ou remplie ». Autant donc remplir les casas particuliers !

 

La magie de La Havane

Puis Valérie Expert oriente la discussion vers la capitale mythique du pays. « S’il y a cinq villes dans sa vie qu’il ne faut pas louper dans le monde, La Havane en fait partie », assure Jean-François Rial qui parle « d’ensemble colonial époustouflant, avec plusieurs villes dans une même ville ». Il va jusqu’à conseiller de n’aller qu’à La Havane « parce que c’est tellement riche en terme de beauté architecturale, artistique, de musique, de restauration, c’est tellement exceptionnel qu’on ne s’ennuie jamais et tout ce qui existe ailleurs : Vinales, Trinidad, Santa Clara… c’est intéressant mais c’est moins bien ». Michel-Yves Labbé est plus mitigé. Il avoue ne pas y être allé depuis longtemps et être influencé par les romans noirs de Leonardo Padura dont le héros « ne se balade visiblement pas dans les mêmes quartiers que Jean-François Rial » ! Jean-Pierre Chanial, lui, partage l’opinion de Jean-François Rial : « la magie de cette ville, c’est de concentrer toute la magie de Cuba. Il y a une animation dans chaque quartier qui est un vrai bonheur et que l’on partage tout de suite grâce à cette capacité des Cubains à tout de suite vous tendre la main ». Il conseille les classiques : la cathédrale, la vieille ville, se balader en vieille Américaine sur le Malecon le long de la mer… Il poursuit : « Une fois que vous avez fait ces classiques, fouillez la ville, allez où votre regard ou votre instinct vous guident, poussez des portes, vous allez tomber sur le dénuement total mais comme chez tous les peuples qui n’ont rien, ils sont prêts à tout donner ». Il enchaîne ensuite sur la scène artistique, qu’il incite également à fouiller pour découvrir « ce qu’est la fierté d’être cubain ». Il parle notamment de la FAC - Fabrica de Arte Contemporeano - : « Vous avez des ateliers, des expositions d’un art qui est au sommet de ce qui se fait dans le monde entier et un excellent restaurant sur le toit, sans oublier la danse et les grands ballets, la musique avec le Buena Vista Social Club et toute une scène qui se produit tous les soirs, la mode avec le magasin indépendant Clandestina, la petite rue Callejon de Hamel qui ressemble un peu à un espace vaudou avec des ateliers, des gens qui peignent, qui sculptent, dans une ambiance extraordinaire ».

 

Enfants qui jouent à La Havanne

Cécile Lhermitte

 

William Navarrete intervient ensuite pour raconter l’histoire de la Milagrosa, une femme enterrée au cimetière Colon de La Havane avec son foetus dans le ventre : « Au moment de l’exhumation, on a découvert qu’elle avait le foetus dans ses bras. Son mari a fait faire une sculpture et elle est devenue en quelque sorte un « marabout ». Les Cubains se recueillent sur sa tombe pour demander certaines choses. Il y a tout un rite ». Il enchaîne sur les superstitions et le riche mélange de religions. Thibaud Perdrix, lui, recommande une adresse pour dîner, au-delà du Vedado, au petit port de pêche de Chanti, dans un cadre authentique avec un ponton en bois. 

Jean-Pierre Chanial mentionne ensuite les parcs, seuls endroits, en plus des grands hôtels, où l’on peut communiquer sur internet via des cartes prépayées : « cela créé des conglomérats de personnes en train de communiquer devant des palmiers ou allongés sur l’herbe ».

 

 

De la magie aux aspects pratiques

Valérie interroge ensuite ses invités sur des aspects pratiques tels que les différentes monnaies. « Depuis lundi, il y a trois monnaies, les Cubains sont priés par le gouvernement d’ouvrir des comptes en dollars », explique William Navarrete. Le dollar, qui était déjà utilisé sur place mais illégalement, arrive en complément du peso, la monnaie exclusivement utilisée par les Cubains, et du CUC, celle utilisée par les touristes. Jean-Pierre Chanial insiste sur la nécessité d’avoir toujours du cash « car à part quelques distributeurs et le change dans les hôtels, il est très difficile de trouver de l’argent liquide ». Il ajoute aussi qu’à La Havane, il manque toujours quelques chose : « il y a des pénuries d’approvisionnement, comme du papier toilettes ! Prévoyez donc des mouchoirs en papier ». Pour se déplacer, même s’il est facile de louer une voiture, Thibaud Perdrix déconseille cette option à cause du mauvais état des routes, des nids de poule et des dangers de la conduite en pleine nuit à cause du manque d’éclairages publics.

 

Du balnéaire à une découverte culturelle du pays

Pour Thibaud Perdrix, « Il y a peut-être deux voyages à faire à Cuba : un qui va se focaliser sur l’ouest de l’île avec La Havane - où il faut rester au moins 5 ou 6 nuits -, Vinales et ses mogotes - des montagnes tabulaires -, ses plantations de café et de tabac, Trinidad car c’est une ville extrêmement belle, coloniale, avec de magnifiques ruelles colorées, Cienfuegos fondée par des Français, et le Cayo Levisa pour les voyageurs qui ne veulent pas démordre du balnéaire ». Quant au deuxième voyage, il préconise l’est, tout comme William Navarrete : « les six provinces de l’Oriente sont les plus intéressantes. C’est là qu’est concentrée toute l’histoire cubaine, de là que sont parties toutes les guerres d’indépendance, la révolution. On y trouve aussi des montagnes, des parcs nationaux, des rivières. C’est aussi là où Christophe Colomb a débarqué pour la première fois et a dit : c’est la plus belle terre que les yeux humains ont vue ». Thibaud Perdrix conseille particulièrement l’Oriente aux voyageurs avertis et aventureux, il parle d’une destination riche en culture « où on a l’impression de fouler les terres de ce qui a fait Cuba aujourd’hui »

Escalier à La Havane

Emiliano Granado/REDUX-REA

Michel-Yves Labbé revient cependant sur le balnéaire en mentionnant les Canadiens qui furent à l’origine de ce type de tourisme à Cuba et il remet les choses en perspective en affirmant que Cuba reste une grosse destination balnéaire, pas seulement pour les Canadiens mais aussi pour les Allemands et même pour les Français. Thibaud Perdrix et Valérie Expert reviennent sur l’évolution du tourisme à Cuba qui s’oriente de plus en plus vers une découverte historique et culturelle du pays. Voyageurs du Monde abonde dans ce sens et propose même des visites de La Havane en compagnie d’experts comme le critique d’art Toni Pinera.

 

La carte postale de Michel-Yves Labbé

C’est sur un portrait de Fidel Castro que Michel-Yves Labbé conclut l’émission à travers sa fameuse carte postale. Il raconte qu’il fut un castriste mais qu’il déchanta vite suite aux révélation des terribles répressions du mouvement. « C’est donc comme un amoureux déçu que je vous parle », avoue-t-il. Pourtant, Michel-Yves Labbé a quand même rencontré Castro en 1992 : « Nous étions une vingtaine et je lui ai parlé assez longuement. Il était déjà âgé mais toujours séducteur et malin comme un singe pour éviter de répondre aux questions gênantes ». Et c’est sur ce côté séducteur du Lider Maximo qu’il souhaite s’attarder… Il raconte : « Fidel était un homme à femmes. Sa première épouse, la seule femme avec qui il se mariera, était une philosophe, Mirta Diaz-Balart, une jolie blonde, issue d’une famille aisée, proche de Batista. Elle « tiendra » de 1948 à 1954 et lui donnera un fils : Fidelito. Fidel aura également une fille, Alina, mais avec sa maîtresse, Natalia Revuelta, une autre blonde ». Puis, Michel-Yves Labbé enchaîne sur la maitresse suivante, la militante Maria Laborde, avec laquelle il aura un fils, Jorge Angel. Puis vient le tour d’une Française, Evelyne Pisier, la soeur de Marie-France : « Elle était en vacances à Cuba avec son petit ami, Bernard Kouchner. Elle est tombée sous le charme de Fidel. Leur liaison a duré 4 ans et s’est terminée avec l’invasion de la Tchécoslovaquie ». Il précise ensuite que c’est avec Dalia  Soto del Valle, une institutrice de 15 ans sa cadette, qu’il aura la relation la plus longue : « Elle lui fera 5 enfants dont les prénoms commenceront tous par « A » !

Scène de vie Cuba

Olivier Romano

Michel-Yves Labbé avoue ensuite avoir gardé « la meilleure » pour la fin : Marita Lorenz, une américano-allemande, qui débarque sur le quai du port de La Havane à 19 ans. « Son père est commandant du paquebot américain, Berlin. Fidel veut visiter les cabines du bateau. Marita propose la sienne. Le coup de foudre immédiat. Mais le bateau repart le lendemain avec Marita épleurée. Quatre jours plus tard, Fidel lui téléphone à New York et lui demande de revenir. Elle saute dans un avion et s’installe pendant huit mois dans la fameuse suite 2408 au 24ème étage de l’hôtel Hilton, la suite de Fidel. Elle tombe enceinte et rencontre pendant sa grossesse un Américain, soit-disant proche de la mafia des casinos. C’est en fait un agent de la CIA. Il s’arrange pour la faire espionner Castro. Victime d’un empoisonnement au moment d’accoucher, elle tombe dans le coma, elle est rapatriée à New York où on lui dit qu’elle a été avortée. Elle prétend que non et que son bébé serait né pendant son coma, son nom : Andres Vasquez. Elle le retrouvera en 1981. « Revenons en 1959, reprend Michel-Yves Labbé, pendant sa convalescence, elle se fait retourner par la CIA et devient furieusement anti-castriste. Elle est envoyée à Cuba en 1961 avec pour mission d’assassiner Castro. Elle a toujours la clé de la suite 2408 où des pistolets sont placés pour qu’elle accomplisse sa mission. Mais Fidel a eu vent de la tentative et l’attend. Quand elle rentre, il lui tend un pistolet et provocateur, il lui dit : « Nul ne peut me tuer » ! Elle hésite et ne tire pas. Ils retombent dans les bras l’un de l’autre ».

Marita Lorentz rentre pourtant à New York où elle continue à travailler pour la CIA. Sa carrière est parsemée de rencontres étonnantes : son premier contact à Cuba fut ensuite l’un des plombiers du Watergate. A Miami, elle a connu Lee Harvey Oswald et Jack Ruby. Elle a aussi été la maitresse du dictateur vénézuélien, Marcos Perez Jimenez, bref une vie incroyable. Puis Michel-Yves Labbé conclut en revenant sur Fidel : « Alors, maintenant que mon meilleur ennemi est mort, allez à Cuba et couchez dans la suite 2408 de l’ancien Hilton devenu le Melia Cohiba ». Ne partez pas non sans les derniers livres de William Navarrette : Le dictionnaire insolite de Cuba aux éditions Cosmopole et son roman Vidalina aux éditions Emmanuelle Collas.