Oman

Oman, l’hymne à la mer

Oman, l’hymne à la mer

Le plus souvent, on visite le petit sultanat du Golfe persique en rêvant d’escapades dans le désert. Oui, mais. On sait moins que ce tapis de sable et de rocailles est longé par une fosse maritime qui permet de plonger et de naviguer au milieu des dauphins, des baleines, des orques… 

 

Ce n’est pas un hasard. Pierre Frolla, détenteur de quatre records du monde de plongée, a récemment séjourné dans le sultanat d’Oman. Ce Monégasque, spécialiste de l’exploration du grand bleu en apnée, est entré un peu plus dans la lumière grâce à sa combinaison qui dessine la silhouette d’une raie manta. Elle lui permet de planer sous l’eau et d’approcher les espèces comme jamais auparavant.

Péninsule du Musandam - ©Jérôme Galland

Oman (309 500 km² et 4,6 millions d’habitants) est frontalier avec les Emirats arabes unis, l’Arabie Saoudite et le Yémen. Un pays désertique, tout de pistes cabossées, de canyons pierreux et de dunes que le souffle du désert sculpte à l’écume des sables. Mais si Pierre Frolla s’y est rendu, c’est surtout parce que le pays est bordé par 3 000 km de côtes dont une bonne partie affiche un étonnant particularisme géologique.

 

Rayés comme des bagnards

Rendez-vous à une trentaine de kilomètres au sud de Mascate, la capitale, du côté de Bandar Khayran, Qurayyat ou encore Tiwi, pour embarquer et filer quelques miles plus avant, sans jamais perdre de vue la terre ferme. D’autres marinas et centres de plongée dernier cri sont également installés plus au sud du sultanat, dans la baie de Salalah et Sharbatat. On peut bien entendu enfiler les bouteilles ou bien se contenter d’un masque et d’un tuba. Prière d’apprécier l’extraordinaire spectacle d’un univers si peu souvent dérangé que raies, requins, barracudas et autres tortues entourés de nuages de petits poissons, tachetés comme des fauves, rayés comme des bagnards, argentés, bariolés, rondouillards ou effilés, bleu Klein, rouge vif, vert fluo, semble vaquer dans l’indifférence totale de ceux qui les approchent. Un hymne à la diversité, une ode à la beauté silencieuse, aux mystères des infinis qui se perdent dans le noir des profondeurs.

Péninsule du Musandam - ©Jérôme Galland

 

Une fosse vertigineuse

L’autre manière d’apprécier la mer d’Oman consiste à sagement rester à bord d’une vedette rapide ou d’un modeste bateau de pêche afin d’aller faire des ronds dans l’eau quelques centaines de mètres au-delà du rivage. En effet, le mini plateau continental cède brutalement la place à une fosse vertigineuse mesurée à plus de 3 000 m de profondeur, sur quelques centaines de kilomètres de longueur. Ce corridor des abysses est balayé par de puissants courants ascendants qui font remonter vers la surface d’imposants nuages de plancton. Les cétacés adorent cette restauration à domicile.

©Office du tourisme du sultanat d'Oman 

Les plus nombreux à en profiter sont les dauphins dont on recense ici une bonne vingtaine d’espèces. A bosse, souffleur, tacheté, bleu, long bec…, ils sont tous là. Les spécialistes se frottent les mains, les vacanciers ordinaires ouvrent des yeux ronds et pestent en triturant la fonction photo de leur téléphone portable. Car très fréquemment, ce sont non pas quelques dauphins égarés qui assurent le rendez-vous mais bel et bien des centaines qui répondent à l’appel du bateau et de ses visiteurs. Certains parlent même de milliers. Ils filent à ses côtés, plongent soudainement, remontent aussi vite pour exécuter une pirouette, dessinent des courbes gracieuses, une vrille, semblent montrer le chemin, nagent sur le flanc, regard brillant, on verrait presqu’un sourire. Difficile de ne pas être alors certain de la communication entre l’animal et l’homme. Surtout quand, sans le moindre signe visible, la troupe entière plonge et disparait. La mer retrouve alors son calme, le spectacle est terminé. Il a été grandiose.

 

Baleines et orques

Entre octobre et mars, les baleines entrent dans la danse. Puissantes, lentes, majestueuses, les voici qui offrent geysers et queues déployées en parasol avant de battre la surface de l’eau. Elles plongent avant de réapparaitre quelques dizaines de mètres plus loin. Impressionnant.

©Getty Images

A la même période, elles sont rejointes par les orques, souvent une trentaine d’individus à la robe noire et blanche. A leur tour, ils assurent le spectacle, surgissent à une vitesse folle, disparaissent aussi vite comme pour magnifier cette part de mystère qu’ils rejoignent dans les ténèbres des grands fonds. Alors, Oman signe l’alliance entre l’esprit de la terre et les âmes de la mer. Dans le ciel brille une pleine lumière. 

 

Par

JEAN-PIERRE CHANIAL